Contracter une infection à la suite de soins médicaux est une épreuve particulièrement difficile pour un patient et ses proches. Au-delà des souffrances physiques et psychologiques, ces situations soulèvent de nombreuses interrogations juridiques : l’infection était-elle évitable ? Qui est responsable ? Existe-t-il un droit à indemnisation ? Et surtout, à quel régime juridique l’infection relève-t-elle ?

Dans la pratique, deux notions reviennent très fréquemment : l’infection nosocomiale et l’infection iatrogène. Ces termes, souvent confondus par les patients — et parfois même par les professionnels — recouvrent pourtant des réalités médicales et juridiques distinctes. Or, cette distinction est déterminante, car elle conditionne le régime de responsabilité applicable, la charge de la preuve, la procédure à engager et les possibilités d’indemnisation, notamment par la solidarité nationale.
Cet article a pour objectif de clarifier la différence entre infection nosocomiale et infection iatrogène, d’en exposer les enjeux juridiques majeurs, et d’expliquer pourquoi l’accompagnement par un avocat en droit de la santé est souvent indispensable pour les victimes.
I. L’infection nosocomiale : définition et cadre juridique
A. Définition médicale de l’infection nosocomiale
Sur le plan médical, une infection est dite nosocomiale lorsqu’elle est contractée au cours ou au décours d’une prise en charge médicale, et qu’elle n’était ni présente ni en incubation au début de cette prise en charge.
Concrètement, il peut s’agir :
- d’une infection survenue pendant une hospitalisation,
- d’une infection apparue après une intervention chirurgicale,
- ou encore d’une infection contractée lors de soins réalisés dans un établissement de santé, un cabinet médical ou un EHPAD.
Le critère essentiel est le lien temporel et causal avec la prise en charge médicale. L’infection peut se manifester plusieurs jours, voire plusieurs semaines après la sortie de l’établissement.
B. Exemples courants d’infections nosocomiales
Les infections nosocomiales peuvent prendre des formes très diverses :
- infections du site opératoire,
- infections urinaires liées à la pose de sondes,
- infections respiratoires contractées lors d’une hospitalisation,
- septicémies,
- infections liées à l’environnement hospitalier (bactéries multi-résistantes).
Ces infections peuvent avoir des conséquences lourdes : prolongation de l’hospitalisation, séquelles définitives, incapacité de travail, voire décès dans les cas les plus graves.
C. Le cadre juridique des infections nosocomiales
Sur le plan juridique, l’infection nosocomiale bénéficie d’un régime particulièrement protecteur pour les victimes.
Depuis la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, le Code de la santé publique prévoit que :
- les établissements de santé sont responsables de plein droit des dommages résultant d’infections nosocomiales,
- sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère.
Cela signifie que la victime n’a pas à démontrer une faute de l’établissement. La seule preuve de l’infection nosocomiale suffit, en principe, à engager la responsabilité.
Ce régime vise à protéger les patients face à des risques infectieux souvent difficiles à prévenir totalement, malgré le respect des protocoles sanitaires.
II. L’infection iatrogène : une notion distincte
A. Définition de l’infection iatrogène
Le terme iatrogène désigne tout dommage causé par un acte médical, un traitement ou un dispositif de santé. Une infection iatrogène est donc une infection résultant directement d’un acte de soin, d’un médicament ou d’un dispositif médical.
Contrairement à l’infection nosocomiale, l’infection iatrogène n’est pas définie principalement par le lieu ou le moment, mais par la cause médicale directe.
B. Exemples d’infections iatrogènes
Parmi les situations les plus fréquentes :
- infection liée à la pose d’un cathéter ou d’une perfusion,
- infection sur prothèse articulaire,
- infection consécutive à une injection,
- infection favorisée par un traitement immunosuppresseur,
- infection liée à un dispositif médical défectueux.
Ces infections peuvent survenir aussi bien en milieu hospitalier qu’en cabinet médical ou en soins ambulatoires.
C. Le régime juridique applicable aux infections iatrogènes
Sur le plan juridique, l’infection iatrogène relève en principe du régime de responsabilité pour faute.
Cela implique que la victime doit démontrer :
- une faute médicale (erreur, négligence, manquement aux règles de l’art),
- un dommage,
- un lien de causalité entre la faute et l’infection.
Cependant, certaines infections iatrogènes peuvent, dans des situations particulières, relever de la solidarité nationale si elles présentent un caractère anormal et une gravité suffisante.
L’analyse est donc plus complexe et repose largement sur l’expertise médicale.
III. Infection nosocomiale et infection iatrogène : quelles différences fondamentales ?

A. Différences sur le plan médical
D’un point de vue médical, la distinction repose principalement sur :
- le contexte d’apparition de l’infection,
- le mécanisme causal.
L’infection nosocomiale est liée à l’environnement de soins et à la prise en charge globale du patient, tandis que l’infection iatrogène est directement imputable à un acte médical précis ou à un traitement.
B. Différences sur le plan juridique
Sur le plan juridique, les différences sont majeures :
- Le régime de responsabilité
- Infection nosocomiale : responsabilité sans faute de l’établissement.
- Infection iatrogène : responsabilité pour faute, sauf exceptions.
- La charge de la preuve
- Infection nosocomiale : la victime n’a pas à prouver une faute.
- Infection iatrogène : la victime doit démontrer une faute ou une anormalité du dommage.
- Les acteurs responsables
- Infection nosocomiale : établissement de santé.
- Infection iatrogène : professionnel de santé, établissement, fabricant de dispositif médical ou laboratoire pharmaceutique.
- Les voies d’indemnisation
- Infection nosocomiale : assurance de l’établissement ou ONIAM.
- Infection iatrogène : assurance du professionnel, ONIAM dans certains cas.
Cette distinction conditionne donc l’ensemble de la stratégie juridique.
IV. Les enjeux juridiques de la qualification de l’infection
A. Un enjeu déterminant pour l’indemnisation
La qualification de l’infection a un impact direct sur les chances d’indemnisation de la victime.
En matière d’infection nosocomiale grave, l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) peut intervenir au titre de la solidarité nationale, notamment lorsque :
- le taux d’atteinte permanente est supérieur à un certain seuil,
- ou en cas de décès.
En revanche, pour les infections iatrogènes, l’accès à l’indemnisation est souvent plus complexe et nécessite une démonstration rigoureuse des responsabilités.
B. Un enjeu procédural majeur
La qualification influence également :
- la juridiction compétente (administrative ou judiciaire),
- le recours à la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI),
- les délais de prescription applicables.
Une erreur de qualification peut entraîner :
- un rejet de la demande,
- une perte de temps,
- voire une prescription des droits de la victime.
C. Le rôle central de l’expertise médicale
Dans la majorité des dossiers, la distinction entre infection nosocomiale et iatrogène repose sur une expertise médicale approfondie.
L’expert analyse notamment :
- l’état de santé antérieur du patient,
- les conditions de réalisation des soins,
- les protocoles d’hygiène,
- la chronologie des symptômes.

La présence d’un avocat aux côtés de la victime lors de cette expertise est essentielle pour garantir le respect du contradictoire et défendre efficacement ses intérêts.
V. Le rôle de l’avocat dans la défense des victimes d’infection
A. Analyse juridique et médicale du dossier
L’avocat spécialisé en droit de la santé procède à :
- l’étude du dossier médical,
- l’identification du type d’infection,
- la recherche des fondements juridiques les plus favorables à la victime.
Cette analyse conditionne toute la stratégie du dossier.
B. Accompagnement lors des expertises
L’expertise médicale est souvent une étape décisive. L’avocat :
- prépare la victime,
- formule des observations écrites,
- pose des questions à l’expert,
- conteste les conclusions défavorables si nécessaire.
C. Mise en œuvre de la procédure d’indemnisation
Selon le cas, l’avocat oriente la victime vers :
- une procédure amiable devant la CCI,
- une action contentieuse devant les juridictions compétentes,
- une demande d’indemnisation auprès de l’ONIAM.
Il veille également à l’évaluation complète des préjudices : souffrances endurées, préjudice professionnel, déficit fonctionnel, préjudice moral, assistance par tierce personne, etc.
Conclusion
La distinction entre infection nosocomiale et infection iatrogène ne relève pas d’un simple débat terminologique. Elle constitue un enjeu juridique fondamental pour les victimes d’infections contractées à la suite de soins médicaux.
Cette qualification conditionne le régime de responsabilité, la charge de la preuve, les voies de recours et les possibilités d’indemnisation. Face à la complexité du droit médical et à l’importance des enjeux humains et financiers, l’accompagnement par un avocat expérimenté est souvent déterminant
Vous êtes victime d’une infection après des soins médicaux ?
Le cabinet Sanajuris accompagne les victimes d’infections nosocomiales et iatrogènes dans toutes les étapes de leur démarche : analyse du dossier, expertise médicale, procédure d’indemnisation amiable ou judiciaire.
Contactez le cabinet Sanajuris pour une étude personnalisée de votre situation et la défense de vos droits.


